Tome deux de la trilogie de l’alliance de fer signée par Anthony Ryan : l’héroic fantasy sans surprise

La Martyre d'Anthony Ryan couverture du livre

La Martyre d’Anthony Ryan vous occupera un week-end pluvieux avec une lecture accessible. Si l’auteur tente de renouveler le genre de l’héroic fantasy, il ne parvient finalement qu’à nous distraire un peu.

L’histoire d’Alwyn brigand métamorphosé en soldat de la Cause : un roman classique d’une Fantasy épique ?

Dans ce livre, Alwyn prend (littéralement) du grade dans l’armée de fidèles d’Évadine Courlain, la capitaine consacrée. Il devient le chef d’un réseau d’espionnage. En même temps, l’influence de la dame effraie les pairs de la couronne qui essayent de la contrecarrer en la manipulant.

Le roi lui demande d’aller mater des révoltes commises au nom de la foi. La commandante et sa troupe s’y rendent pour apporter la « véritable » croyance.

Notre avis mitigé sur la Martyre d’Anthony Ryan : un imaginaire sans personnages attachants

Si les personnages suivent leur capitaine consacrée les yeux fermés sans abandonner la bataille, le lecteur a dû mal à faire de même avec cet ouvrage. La tentation de le lâcher est grande tant le roman manque d’originalité.

Vous allez me dire que plus personne n’invente de nouvelles histoires, que tous les scénarios ont déjà été rédigés. Of course, dear reader ! L’astuce ou plutôt la magie de la littérature est que chaque écrivain ou écrivaine apporte sa singularité à une trame précédemment utilisée. Plusieurs axes aident à l’écriture. Dans l’imaginaire, on peut compter sur l’univers même s’il ne suffit pas

Sinon, ce sont les personnages, leurs enjeux qui permettent à un roman de se distinguer. Leur substance, en particulier celle des protagonistes et des antagonistes, offre aux lecteurs une expérience inédite. Quant aux secondaires, ils servent l’intrigue autant que les principaux.

Nous ne nous attachons vraiment à personne dans cet ouvrage d’Anthony Ryan. Alwyn rencontre pourtant bien du monde. Malgré tout, on se retrouve bien en peine devant cet étalage peu alléchant. Dans la Martyre, les personnages les plus importants ne suscitent pas la curiosité qu’il devrait, et les autres à peine plus.

Alors, nous nous raccrochons à Alwyn. On suit son intrigue avec plus ou moins d’intérêts. Quelques fulgurances l’empêchent d’être insipide. Un fameux livre (difficile de l’évoquer plus précisément sans spoiler) fait office d’élément de surprise. Toutefois, on ne s’y retrouve pas vraiment. Divers auteurs ont travaillé sur ce genre de rebondissements avec plus de bonheur (La trilogie de Licanius par exemple).

Couverture du livre la Martyre d'Anthony Ryan. Tome deux de la trilogie de l'alliance de fer. Un guerrier en armure se tient sur les remparts d'un chateau au fond, on aperçoit une femme.
Couverture classiquement fade

Casting féminin dans une Fantasy classique : un essai non transformé

En parcourant ce tome, on se surprend parfois à penser aux classiques du genre (David Gemmel) : d’un côté, des héros plus ou moins sympathiques, de l’autre, les héroïnes sans envergure. La Fantasy de cette époque n’a que peu travaillé les personnages féminins. Anthony Ryan s’efforce de remédier à ce talon d’Achille dans la Martyre.

Malheureusement, il n’atteint pas son objectif si cela en est un. Même si les femmes sont nombreuses dans cette saga, elles paraissent peu abouties dans cette suite (Toria ou Silhda du premier semblent plutôt bien nuancées). Excepté que cela reste frustrant pour la lectrice et fatigant à notre époque, cela porte surtout préjudice au roman.

En effet, toute l’histoire tourne aussi autour d’un personnage féminin : Évadine Courlain. Mais, son intrigue nous laisse également ce goût de non-fini. Quelque chose se joue chez elle pendant une bonne partie du récit. On nous promet une évolution, on attend un basculement. Et puis, rien ne viendra répondre à cette attente.

Finalement, ce ne sera qu’évoqué superficiellement par un laconique « elle a changé » destiné à Alwyn. Nous, lecteurs ou lectrices, sommes mis devant le fait accompli, et Évadine perd ainsi en cohérence, ainsi qu’en crédibilité. Comme elle demeure un élément essentiel de la saga, le capital intérêt pour le roman faiblit.

Pour ce type de scénario, on peut en conclure qu’un récit choral aurait peut-être été un choix judicieux. Ou alors, il aurait fallu nous montrer ou raconter l’évolution de la capitaine consacrée et martyre d’une façon plus marquée. Connaissant l’expertise d’Anthony Ryan, le prochain tome nous aidera sûrement à mieux appréhender Évadine. Néanmoins, elle nous échappe dans celui-là et notre expérience en pâtit.

Si vous aimez ce genre, voici des propositions d’ouvrages pour comprendre notre propos :

Dans ces livres, les figures féminines existent vraiment ainsi que leurs homologues masculins. Toutes les nuances, les évolutions de chacun et chacune sont parfaitement visibles, comme cohérentes.

En bref, la Martyre d’Anthony Ryan nous narre une histoire divertissante saupoudrée de personnages peu charismatiques. Les fans de l’auteur aimeront peut-être. Sinon, de nouveaux ouvrages sûrement plus captivants sortent prochainement.

C’est très délicat d’écrire que la Martyre d’Anthony Ryan est bien, mais tout autant de dire qu’il est mauvais. Il n’est ni l’un, ni l’autre. Ce sera un « dois mieux faire » à son auteur et Bragelonne sa maison d’édition en France.

©Priss

Ps : article rédigé à la demande d’un site qui a refusé de le publier car trop « insicif » (quand je pense que je me suis censurée en plus) : faudrait pas fâcher les patrons…